Armes de Poing Iconiques du Cinéma et de la Culture Pop

 

Deuxième Partie

(voir Colt SAA 1873 pour la première partie)

 

Le Revolver Smith & Wesson M 29 : Do You Feel Lucky, Punk ?

 

Le mot revolver provient initialement du latin revolvere ou revolvare qui signifie tourner. Son évolution a donné en espagnol le verbe revolver (bouger, remuer), et en anglais to revolve (provoquer une rotation). L’ancien français utilisait également le verbe revolver dans le sens de dérouler ou feuilleter. L’apparition des pistolets à système rotatifs, et donc dotés d’un barillet, donna un sens nouveau au terme revolver qui devint internationalement l’appellation consensuelle de ce type d’armes de poing.

 

Cette acception nouvelle, dont la sonorité et la signification s’entendaient aisément dans ces trois grandes langues européennes et américaines, fit entrer le mot revolver dans la culture populaire, parfois dans son double sens. Par exemple, on le retrouve dans le monde musical avec le septième album des Beatles intitulé « Revolver » en 1966, le groupe de rock français baptisé « Revolver », le groupe de rock américain « Velvet Revolver », et évidemment l’imparable tube de Marc Lavoine « Elle a les Yeux Revolver » sorti en 1985 (composée par Fabrice Aboulker). En littérature, le terme apparaît dans le titre de nombreux ouvrages policiers, dont notamment « Le Revolver de Maigret » de Georges Simenon en 1952. Le cinéma n’est évidemment pas en reste avec par exemple le film intitulé « Revolver » de Guy Ritchie en 2005, dont le scénario est co-signé avec Luc Besson, avec Jason Statham et Ray Liotta dans les rôles principaux.

 

L’un des revolvers ayant le plus contribué à l’imaginaire collectif est le Smith & Wesson M 29, ayant vu le jour en 1955 sous le nom "44 Magnum" puis sous celui de "Modèle 29" en 1957. Chambré dans la munition de 44 Magnum, il passe à sa sortie pour l’arme de poing la plus puissante du monde, record bien mis en avant sur les publicités d’époque (voir Photo 1).

 

 

Lourd et imposant avec ses canons de 6 ou 8 pouces (jusqu’à 1,4 kg chargé et plus de 35 cms), c’est une arme photogénique et impressionnante apte à séduire les réalisateurs de films d’action ou policiers. Il va ainsi entrer dans la légende grâce à quelques apparitions majeures sur les écrans. Cette notoriété sera mise à profit par plusieurs fournisseurs de répliques à propulsion CO2 ou à ressort en calibres 4,5 mm ou 6 mm BB. Un collectionneur ne souhaitant pas acquérir le modèle authentique pourra donc bénéficier d’un clone de qualité, notamment le récent M 29 de la société Umarex (sous licence) particulièrement réussi.

 

Il y a Smith, Wesson et… Clint

 

- Nous n’allons pas vous laisser partir comme ça…

- Qui ça nous, t'es tout seul, connard !

- Smith, Wesson et moi! »

(Extrait de « Le Retour de l’Inspecteur Harry », voir ci-dessous).

 

Si la première apparition du S&W M 29 eut lieu en 1967 dans les mains de Lee Marvin pour le film « Point Blank » dirigé par John Boorman, c’est à partir de 1971 qu’il accède à la célébrité avec Clint Eastwood dans la saga des enquêtes de l’Inspecteur Harry Callahan, surnommé « Dirty Harry », composée de 5 films :

 

« L’Inspecteur Harry », réalisé par Don Siegel en 1971.

« Magnum Force », réalisé par Ted Force en 1973.

«  L’Inspecteur ne Renonce Jamais », réalisé par James Fargo en 1976.

«  Le Retour de l’Inspecteur Harry », réalisé par Clint Eastwood en 1983.

«  La Dernière Cible », réalisé par Buddy Van Horn en 1988.

 

Dans ces cinq films, Clint Eastwood campe un personnage profondément ambigu, dont la première lecture n’est guère sympathique : violent voire brutal, cynique, souvent raciste et sexiste dans ses propos, d’un vocabulaire grossier, réfractaire à l’autorité et parfois aux lois… Cependant l’évolution du personnage le révèle au fil des scénarios beaucoup plus humain et complexe qu’en première analyse, amenant finalement une des questions centrales de l’œuvre de Clint Eastwood comme acteur et réalisateur : « Que doit faire l’homme juste face à l’innommable, à la barbarie, au crime, à la violence aveugle, à l’injustice ? ». Les films ne tranchent pas, c’est au spectateur de se forger une réponse en fonction de ses convictions personnelles. Les préjugés de l’Inspecteur Harry se diluent au fil des scénarios où il finit par sympathiser avec un partenaire d’origine latino (dans L’Inspecteur Harry), une coéquipière femme (dans L’Inspecteur ne Renonce Jamais), et où il s’oppose à un groupuscule de jeunes policiers adeptes d’une « justice » aveugle et expéditive (dans Magnum Force).

 

Dans cette série de films, le personnage est en permanence assisté de son Smith & Wesson M 29 qui devient un élément incontournable de la saga… Et dont l’image devient rapidement une icône dans la culture populaire, contribuant ainsi à la légende des armes de poing au cinéma.

 

Ainsi, le M 29 devient l’une des rares armes à bénéficier d’une tirade devenue culte : « Ah Ah, I know what you're thinking. 'Did he fire six shots or only five?' Well, to tell you the truth, in all this excitement I've kinda lost track myself. But being this is a .44 Magnum, the most powerful handgun in the world, and would blow your head clean off, you've got to ask yourself one question: 'Do I feel lucky?' Well, do ya, punk? ».

 

La haute silhouette longiligne de l’acteur, toujours muni de son Magnum, est reproduite sous forme de nombreuses figurines commerciales ou customisées avec talent par des amateurs, comme celles représentées dans la photo 4.

 

Les produits dérivés, sous licence ou non, ne tardent pas à apparaître, dont de nombreux encore commercialisés aujourd’hui. Le quotidien d’un amateur de culture pop bénéficie ainsi d’objets usuels décorés d’images de l’acteur ou du revolver seul.

 

La société Williams ira jusqu’à produire un flipper intitulé « Dirty Harry » dont la table est décorée de portraits de Clint Eastwood et de scènes d’action mettant en jeu son S&W M 29. Le lance-bille s’y présente sous forme d’une poignée de revolver… Pour les amateurs de jeux vidéo, Nintendo développa un jeu pour console de salon (Dirty Harry), de même qu’Atari dans un pastiche intitulé « Dirty Larry » (oui, oui, Larry…).

 

A partir d’images piochées sur Internet, il est aisé au collectionneur de confectionner le badge de Dirty Harry, qui complètera sympathiquement un ensemble consacré au détective.

 

Il y a Smith, Wesson et… les Autres

 

Bien d’autres apparitions du S&W M 29 sont notables au cinéma. En France, il est manipulé par Yves Montand dans « Le Choix des Armes » d’Alain Corneau (1981), ainsi que par Lee Marvin et Miou-Miou dans « Canicule » d’Yves Boisset (1984). Mais c’est surtout dans deux autres grands films qu’il complète sa légende.

 

En effet, lorsque la licence James Bond tente de s’affranchir du Walther PPK comme arme fétiche de l’agent 007, c’est vers le M 29 qu’elle se tourne. Sir Roger Moore, dans son premier film dans le rôle, utilise ce revolver dans « Vivre et Laisser Mourir » de Guy Hamilton en 1973.

 

Mais plus notable encore est l’utilisation du S&W M 29 dans le chef-d’œuvre « Taxi Driver » de Martin Scorcese en 1976 (Palme d’Or à Cannes), où se révèle l’immense talent de Robert de Niro. Dans une scène mythique à l’intérieur de son appartement, son personnage Travis Bickle se regarde dans le miroir, jouant l’arme à la main et répétant plusieurs fois « You talkin’ to me ? ». Il se dit que de Niro aurait été inspiré pour cette tirade par Bruce Springsteen s'adressant en concert à son public par cette même formule.

 

Conclusion

 

Le Smith & Wesson M 29 demeure indissociable de la saga « Dirty Harry », devenant ainsi l’une des armes de poing les plus mythiques du cinéma et de la culture pop… Ainsi que les répliques devenues cultes proférées par l’Inspecteur : « Go Ahead, Make my Day », « Do You Feel Lucky, Punk ? »  et « Smith, Wesson & Me ! » qui sont classées parmi les 100 réparties inoubliables du cinéma américain (https://www.afi.com/afis-100-years-100-movie-quotes/).

 

Et même le coffret de DVDs collector consacré à l’intégrale des aventures de l’Inspecteur Harry focalise sur une représentation de l’arme plutôt qu’à celle de l’acteur (voir photo 10)…

 

 

Remerciements

 

Si ringrazia il Sig. Federico Mauro, multimedia designer e artista, per l'autorizzazione alla riproduzione delle immagini, pubblicate nel suo website intitolato « Famous Guns » (https://federicomauro.eu/famous-guns).

 

Thanks to Captain Coder, https://www.figurerealm.com/, for allowing reproduction of photos from his website.

 

Et merci à Fabrice, Miguel et Alberto pour leurs conseils linguistiques respectivement en français, espagnol et italien.

 

Pour en Savoir Plus

 

Pour éviter tout risque de litige sur les droits de reproduction, nous avons choisi (à regret) de ne pas représenter d’images, d’affiches ou de photos d’acteurs des films cités, hormis les reproductions philatéliques et d’objets dérivés. Cependant, le site spécialisé « Internet Movie Firearms Database » permet d’accéder à des milliers d’informations et de photos dans ce domaine : https://www.imfdb.org/wiki/Main_Page.

 

Pour les biographies des personnes citées et toutes les informations sur les films :

https://www.wikipedia.org/

 

Sources Internet sur le S&W M 29 :

https://fr.wikipedia.org/wiki/S%26W_Model_29

https://www.ontargetmagazine.com/2020/09/smith-wesson-classics-model-29/

https://www.americanrifleman.org/content/dirty-harry-s-model-29-america-s-shooting-star/

 

Articles de magazines en français traitant S&W M 29 :

Gazette des Armes, N°163, mars 1987, par Yves Cadiou

L’Amateur d’Armes, N°79, juin 1988, par Jean-Louis Cadart

Action, Armes et Tir, N°314, novembre 2007, par Michel Bottreau

 

Jean-Christophe Plaquevent

Retour "SMITH & WESSON"